Très beau cadeau aux Aixois
Grand Théâtre de Provence, Aix en Provence le 2 janvier 2022
Orchestre National de France ; Cristian Măcelaru, direction ; Seong-Jin Cho, piano ; Carlos Ferreira, clarinette ; Sarah Nemtanu, violon
Emmanuel Chabrier, La Bourrée fantasque. Sergueï Rachmaninov, Rhapsodie sur un thème de Paganini en la mineur, op. 43. Hector Berlioz. Symphonie fantastique, « Un Bal ». Jacques Offenbach, Orphée aux Enfers, Galop infernal. Georges Bizet, Carmen, suite n°2. Claude Debussy, Rhapsodie pour clarinette en si bémol. Emmanuel Chabrier, España. Camille Saint-Saëns, Havanaise pour violon. Maurice Ravel, Boléro
C’est un très beau cadeau qu’a fait aux Aixois l’Orchestre National de France en ce début 2022 ! Placé sous la baguette de Cristian Măcelaru, directeur musical de la formation depuis septembre 2020, le concert a fait salle pleine au Grand Théâtre de Provence.
Dès la Bourrée fantasque de Chabrier, on apprécie la somptueuse étoffe orchestrale ainsi que la précision rythmique et le brillant des pupitres des cuivres. Place ensuite au morceau de choix de la première partie, la Rhapsodie de Rachmaninov sur un thème de Paganini, rendue célèbre par certain générique d’émission télévisée. Le thème de Paganini est facilement reconnaissable pendant les premières des 24 variations, mais l’exercice d’identification s’avère rapidement d’une grande complexité, tant les tempi et nuances sont variés, dans une imagination mélodique débordante. Qui dit Paganini dit virtuosité, et le pianiste Seong-Jin Cho n’en manque heureusement pas ! Mais il sait aussi faire jeu égal dans la délicatesse d’interprétation avec certains unissons de cordes d’un romantisme exacerbé.
Les deux extraits qui suivent font presque office de mignardises après cette Rhapsodie d’une durée de 25 minutes environ. C’est d’abord le Bal de la Fantastique berliozienne, très dansant et rare passage guilleret de cette symphonie marquée d’un noir pessimisme. Puis vient le Galop infernal conclusif du deuxième acte d’Orphée aux Enfers chez Offenbach, sans les paroles ni French cancan ce soir … mais il n’est pas interdit de se les passer en tête !
Le programme bascule très nettement vers l’espagnol après l’entracte, en démarrant avec la suite n°2 de Carmen, où l’on entend deux thèmes de l’opéra de Bizet, la voix de la Gitane passant successivement par le hautbois, la clarinette, la trompette… C’est ensuite le deuxième soliste de la soirée, le clarinettiste solo de l’ONF Carlos Ferreira qui entre sur le plateau pour jouer la Rhapsodie pour clarinette de Debussy. L’ambiance et les couleurs sont en effet très debussystes et rappellent plusieurs fois une autre de ses compositions La Mer. L’instrumentiste y fait preuve tour à tour d’expressivité et de virtuosité… et quel souffle !
Retour de Chabrier pour España à l’ambiance méditerranéenne et ensoleillée, interprétée par un orchestre techniquement sans faille pour ce qui concerne les cassures de rythmes. Troisième et dernière soliste du programme, la violoniste Sarah Nemtanu alterne également entre moments élégiaques et passages exigeant vitesse et abattage tout au long de la Havanaise de Saint-Saëns aux thèmes là encore nettement hispanisants.
Dernier morceau au programme, le Boléro de Ravel permet à chaque pupitre de faire son entrée chacun à son tour, en contribuant à la montée en puissance de l’ensemble de la phalange. Le chef veille, par un tempo raisonnablement lent, à la bonne exécution de la partition qui se conclut avec un grand brillant mais sans tumulte final qui tendrait à l’assourdissement.
A l’issue de ces presque deux heures de musique, les artistes en rajoutent dans la générosité avec deux bis. C’est d’abord la Bacchanale de Samson et Dalila de Saint-Saëns et son final véritablement infernal qui déclenche les ovations de la salle, avant une plus douce mélodie espagnole pour faire redescendre la pression… beau début d’année musical à Aix-en-Provence !
F.J. Photo I.F.
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