Dénoncer pour fraterniser
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Théâtre Avignon- Reine Blanche, 11h00 du 03/07 au 21/07, Tel 04 90 85 38 17 et aussi par Internet ; Théâtre contemporain français, (à partir de 14 ans).
Lorsque la lumière illumine le plateau, nous découvrons deux jeunes femmes, qui se sourient, simplement entourées de tout un appareillage sonore : table de mixage, guitare, micro… il s’agit du matériel qu’utilisera Triinu Tammsalu. C’est une auteure-compositrice-interprète née en Estonie. Elle dialoguera musicalement avec Karine Pedurand qui met en voix le texte. Sa musique accentue le propos de l’auteure, plus qu’elle ne le souligne. On perçoit dès le début une grande complicité entre ces deux artistes.
Le spectacle est construit à partir de trois écrits de Léonora Miano. Dans sa mise en scène, Catherine Vrignaud Cohen participe au débat sur les relations entre les Hommes. Elle souhaite « questionner la relation entre l’Occident et l’Afrique, la relation que nous avons à la couleur de la peau, la relation que nous avons à l’altérité, comme miroir de notre humanité. »
Ce qu’il faut dire débute par : La question blanche. La voix de Karine Pedurand est agréable, cordiale. Elle sourit. Pourtant, elle dénonce clairement la classification des humains par races d’inégale importance. La construction des phrases de Léonora Miano est littéraire, son vocabulaire soutenu. Cela donne un relief encore plus fort à son propos.
En deuxième partie : Le fond des choses, la comédienne s’est saisie d’un micro. L’intensification sonore et la gestuelle plus ample soutiennent le texte qui rappelle les vagues de migration des européens avant que ne débutent celles qui sont dénoncées, depuis quelques dizaines d’années, en provenance d’Afrique. La musique, à la guitare, est plus rythmée. Cependant, ce tableau qui veut montrer le fond des choses, semble utiliser un prisme. Des noms de dirigeants d’il y a plusieurs siècles cités ici avec la répétition de la phrase « Les héros des uns sont les bourreaux des autres. » m’a paru excessive. Certes, c’est légitime eu égard aux faits. Cependant, cela a obscurci l’entrée dans la troisième partie : La fin des fins, qui est censée aller vers la fraternité entre les Hommes. L’utilisation d’un archet sur la guitare par Triinu Tammsalu pique les oreilles des spectateurs. Cette invention musicale est néanmoins intéressante. A quelques pas, Karine Pedurand reprend ce beau sourire qui capte toute notre attention.
Il est indispensable de gratter les esprits comme le font chacune des conceptrices de Ce qu’il faut dire. La dénonciation de nombreux actes est importante et c’est fait avec force et poésie. Et le public, nombreux apprécie. Néanmoins, pour ma part je n’y ai pas entendu comment avancer les uns vers les autres pour fraterniser. Peut-être est-ce davantage l’objet de la seconde version du spectacle, avec échange avec la salle ?
Norbert. Photo cie Empreintes
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