Aix-en-Provence, Théâtre du Jeu de Paume (26-10-2021)
Ensemble Café Zimmermann ; Damien Guillon, contre-ténor
Johann Heinrich Schmelzer (1623-1680), Serenata con altre Arie a cinque. Heinrich Ignaz Franz Biber (1644-1704), O dulcis Jesu ; Pars III aus Mensa Sonora. Johann Michael Bach (1648-1694), Ach wie sehnlich wart ich der Zeit. Johann Jakob Froberger (1616-1667), Toccata II, Livre de 1649 ; Ricercar I, Livre de 1656. Heinrich Ignaz Franz Biber (1644-1704), Passacaglia, extrait des Sonates du Rosaire. Christoph Bernhard (1628-1692), Was betrübst Du Dich. Johann Heinrich Schmelzer (1623-1680), Lamento Sopra la morte Ferdinand III. Johann Christoph Bach (1642-1703), Ach, dass ich wassers gnug hätte.
Âmes déprimées s’abstenir ! En résidence à Aix-en-Provence depuis dix ans, la formation baroque Café Zimmermann nous propose un programme intitulé « Lamento », en compagnie du contre-ténor Damien Guillon. Les partitions du soir, écrites par des compositeurs rarement joués, proviennent du XVIIe siècle, même si c’est à Claudio Monteverdi (1567-1643) qu’on pense en priorité lorsqu’on évoque le lamento, un air de déploration qui illustre la perte d’un être cher ou la mort plus généralement.
Le concert alterne entre parties chantées et instrumentales, et la première de celles-ci, de Johann Heinrich Schmelzer, surprend par ses mouvements sautillants par moments, loin de la tristesse supposée du thème de la soirée. Du même compositeur, le lamento sur la mort de Ferdinand III commence aussi par une déploration, mais, après une courte fugue, se termine par des rythmes plus joyeux de danse. Comme l’indique le premier violon Pablo Valetti avant d’entamer le morceau, c’est un peu « Le roi est mort, vive le roi ! ».
« O dulcis Jesu » du compositeur Heinrich Ignaz Franz Biber met en situation la mort, plus précisément le chemin du Chrétien vers la mort. La voix est sollicitée sur toute la tessiture, avec une même belle qualité de timbre, des aigus aériens et suffisamment de souplesse pour les petits passages d’agilité. La musique est quant à elle à la fois simple et dense, un continuo au violoncelle et l’orgue, tandis que le violon se charge de l’accompagnement principal, parfois très virtuose. En deuxième partie de programme, la Passacaglia jouée par le violon seul de Pablo Valetti exige également musicalité et abattage.
Un autre extrait pour instrument, une toccata de Johann Jakob Froberger, nous permet d’entendre Céline Frisch à l’orgue seul, qui varie registres et puissances, avant la déploration « Was betrübst Du Dich » de Christoph Bernhard, très beau chant d’une grande profondeur qui va à l’essentiel.
La famille Bach est également à l’affiche, pas Johann Sebastian (1685-1750), mais d’abord son beau-père Johann Michael (1648-1694) avec l’air « Ach wie sehnlich wart ich der Zeit » écrit pour un rite funéraire et la voix du contre-ténor qui sonne idéalement dans l’écrin du petit théâtre du Jeu de Paume. Puis la conclusion du programme est dévolue à Johann Christoph Bach (1642-1703), cousin germain du père de Johann Sebastian. « Ach, dass ich wassers gnug hätte » était l’un des lamenti allemands les plus connus de l’époque, la voix se fait ici douleur, dans un équilibre harmonieux avec les instrumentistes.
Johann Sebastian Bach rejoint tout de même la famille pour le bis, avec un extrait de sa cantate « Vergnügte Ruh, beliebste Seelenlust ». Comme l’indique Damien Guillon, on finit ainsi sur une note plus lumineuse… et quelle magnifique musique !
F.J. Photos I.F.
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