La Magie Noire de Bruno Rigutto
Bruno Rigutto, piano
Auditorium du Parc, La Roque d’Anthéron
Intégrale des Nocturnes
Entre Bruno Rigutto et Chopin, c’est une longue familiarité. Mais les conditions sanitaires font de ce récital une soirée exceptionnelle, un véritable défi, avec l’intégrale des 21 Nocturnes offerte en 2h sans entracte !
Bruno Rigutto n’a jamais vraiment quitté Chopin. Devant le succès dont fait l’objet son récent enregistrement de l’intégrale des Nocturnes*, René Martin directeur artistique a invité le pianiste à présenter cette œuvre au public averti de la Roque d’Anthéron.
A conditions exceptionnelles, ambiance exceptionnelle !
Un public réduit des 2/3 a de quoi déstabiliser un soliste. Les contraintes sanitaires l’obligent à jouer l’intégrale des 21 Nocturnes sans entracte, véritable marathon pianistique de deux heures. Bruno Rigutto avance sur scène avec un stress visible. Comme Jean-Marc Luisada ou Alexandre Tharaud, il se rassure avec la présence de la partition, on peut le comprendre !
Très concentré, l’artiste attaque les premiers Nocturnes de manière un peu sèche (Nocturnes 1 et 2 op 9) mais très vite on trouve des traits de lumière, une sensualité dont le chant s’épanouit, paisible et serein. On ressent l’âme de Chopin. Les Nocturnes joués par ordre chronologique de composition soulignent l’évolution intime du compositeur. (Nocturnes 2 et 3 op 15). D’une précision presque métronomique, l’artiste nous entraîne dans un rythme parfois étonnamment rapide (Nocturnes op 32 ). Bruno Rigutto varie à l’infini les ambiances et les couleurs, accompagné en cela par le chant du vent dans les sequoias. Les derniers nocturnes sont un enchantement, on est saisi par l’intériorité vibrante de cette interprétation. Dans le livret de son C.D. Bruno Rigutto parle de « Magie Noire », de recherche intérieure pour trouver des nuances complexes. Devant l’ovation du public, l’artiste nous offre en bis la Valse en sol bémol majeur que Schubert écrivit pour le mariage de l’un de ses amis. En guise de ter, « l’Italien » joue l’une de ses propres compositions, une mélodie napolitaine. Le piano se transforme alors en mandoline avec ses tremolos qui nous font voyager dans le sud de l’Italie. Superbe soirée ! (D.B. Photo Christophe Grémiot).
*A ne pas manquer: l’enregistrement des Nocturnes (chez Apartemusic) par Bruno Rigutto qui nous offre une excellente version de ce concert.
Lire par ailleurs l’entretien que Bruno Rigutto nous avait accordé quelques jours avant le concert.
Laisser un commentaire