Avec son physique de premier de la classe, ou de gendre idéal, Bertrand Chamayou sait marier, à sa délicate sensibilité, des interprétations vigoureuses. Il vient (mardi 14 mars 2017) pour la quatrième fois dans la cité des papes, à l’Opéra du Grand Avignon, après un récital solo en 2007, un concert symphonique avec l’Orchestre Régional Avignon-Provence en 2014, puis un duo avec la violoncelliste Sol Gabetta en 2015, et cette fois à nouveau en solo.
-Entre Ravel, Liszt et Schubert, comment s’est constitué votre programme ?
–De Liszt, ce n’est qu’une transcription. Ce sont en fait mes attirances personnelles. J’aime énormément de choses dans l’histoire de la musique, et au fil des années je me suis attaché à tel ou tel compositeur pour tel projet, de concert ou de CD par exemple. Ravel, c’est une musique qui me parle depuis tout petit, et piano de Ravel doit beaucoup à Liszt. Quant à la Fantaisie de Schubert, c’est une de mes œuvres-fétiches, qui a été essentielle pour moi quand j’étais adolescent. Tout cela, c’est un piano vif argent, un romantisme impressionniste, parfois démoniaque comme dans Gaspard de la nuit.
-Vous commencerez la soirée par Jeux d’eau, une très belle pièce mais controversée : Ravel qui l’avait composée en était satisfait et Fauré l’admirait, mais un Saint-Saëns n’y entendait que cacophonie. Comment l’abordez-vous vous-même ?
–Je commence souvent par cette pièce. Je l’avais entendue à 8 ans par un pianiste qui avait travaillé avec Ravel lui-même ; j’en ai un souvenir vague, mais cela m’a ouvert un monde nouveau ; d’autant que j’en avais vu la partition auparavant, chez un ami pianiste plus âgé que moi, et elle m’avait fasciné par toutes ces notes qui ressemblaient à autant de gouttes d’eau….
-Vous êtes à la fois concertiste, chambriste, soliste. Elève de Jean-François Heisser, allez-vous comme lui vous lancer dans la direction d’orchestre, du piano ?
–Bonne question. Encore récemment j’ai refusé. Pour se lancer, il faut en sentir la nécessité, et ce n’est pas encore mon cas. Je me garde de toute « dirigite ». Il est vrai que souvent j’aime être meneur de projets fédérateurs de groupe, mais de là à diriger...
-Un mot de votre participation au Festival Pâques 2017 de Renaud Capuçon ?
-C’est justement un orchestre américain qui joue sans chef, « Les Chevaliers », qui se produit dans les plus grandes salles, avec des programmes très originaux. Ils m’ont proposé de jouer avec eux un melting-pot, et en ouverture je jouerai en solo Malédiction de Liszt, une œuvre de jeunesse, peu connue. Ce sera comme un concert de chambre élargi, et sauf quelques signes que je ferai du piano au début, nous jouerons sans chef.
-Votre venue dans le Vaucluse ?
-J’ai toujours grand plaisir à jouer à Avignon, pour la ville et pour son opéra-théâtre : l’attractivité de la ville est largement liée à la programmation extraordinaire de l’opéra. (Propos recueillis par G.ad.)
Bio express
Né en 1981 à Toulouse, Bertrand Chamayou est remarqué à 13 ans par Jean-François Heisser, professeur au CNSM de Paris, dont il suivra les cours. Il travaillera aussi avec d’autres pianistes de référence.
Personnalité discrète mais artiste connu et reconnu, Bertrand Chamayou est aujourd’hui sollicité par les plus grands orchestres dans le monde, sur les scènes internationales, avec d’autres solistes de renom (dont Sol Gabetta, Renaud Capuçon, Augustin Dumay, Antoine Tamestit, Gautier Capuçon, Paul Meyer, Emmanuel Pahud, les quatuors Ebène ou Ysaÿe) et sous des baguettes prestigieuses (Emmanuel Krivine, Michel Plasson, Fayçal Karoui, Tugan Sokhiev, Lawrence Foster, pour ne citer que les plus connues dans la région).
Il a été trois fois lauréat – une rareté – des Victoires de la Musique classique : Révélation Soliste instrumental (2006), Soliste instrumental de l’année (2011), Meilleur enregistrement de l’année (Liszt, 2012). Il était encore nommé en 2015 comme Soliste instrumental de l’année et invité en 2017.
Tous ses enregistrements (dont Liszt, Franck en 2010, Schubert 2015, Ravel 2016) ont été couronnés de prix internationaux prestigieux.
C’est un habitué du Festival de La Roque-d’Anthéron, et cette année (2017) il participera (mardi 14 avril 2020) au 5e Festival de Pâques de Renaud Capuçon à Aix-en-Provence (4-19 avril).
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