« Triptyque russe ». Grand Théâtre de Provence, à Aix-en-Provence (mercredi 4 décembre 2019)
Anima Eterna Brugge. Direction Jos van Immerseel. Piano Anna Vinnitskaya
Nikolaï Rimski-Korsakov, La Grande Pâque russe, ouverture op. 36. Serge Rachmaninoff, Rhapsodie sur un thème de Paganini ; Vocalise. Sergueï Prokofiev, Roméo et Juliette, Suite de ballet n°2
Au GTP, le grand répertoire russe, par l’orchestre Anima Eterna, dirigé par son fondateur Jos van Immerseel, avec Anna Vinnitskaya piano solo
Soirée russe au Grand Théâtre de Provence à Aix, où dès les premières mesures de l’ouverture de La Grande Pâque russe de Rimski-Korsakov, la couleur locale est bien dessinée, voire la légendaire âme russe évoquée, d’abord dans les mélodies, et aussi dans l’orchestration. Le doux démarrage installe une atmosphère de contemplation, puis cela s’anime, aux cuivres en particulier, même si cette partition ne constitue pas la plus démonstrative. Il faut dire que la formation orchestrale Anima Eterna Brugge, placée sous la direction de Jos van Immerseel, joue, pour partie, sur instruments anciens, et délivre ainsi une interprétation plus délicate, moins clinquante que ce qu’on peut entendre habituellement dans ce répertoire.
Pour la vocalise de Rachmaninov, les huit violons qui jouent la mélodie principale – mélodie très connue, comme le font malheureusement savoir plusieurs spectateurs à leur voisinage immédiat ! -, sont placés en fond d’orchestre, et bénéficient d’une acoustique renforcée par le renvoi du son par les parois de bois devant lesquelles ils se tiennent. La cohésion d’ensemble des cordes est très au point, les bois sont joliment maîtrisés, cette pièce correspondant certainement mieux à la nature de l’orchestre de ce soir que le Rimski-Korsakov précédent.
Mais c’est surtout le second opus de Rachmaninov, la Rhapsodie sur un thème de Paganini, que le public attend ce soir, avec l’entrée en scène de la pianiste Anna Vinnitskaya. La phalange brugeoise lâche un peu les décibels, mais la soliste a pour le moins du répondant, et impose sa forte présence naturelle. Elle paraît se jouer de l’extrême virtuosité de la partition composée autour du thème de Paganini – dans les cadences d’exécution, la gamme très étendue de nuances de frappe, notamment -, sans jamais trahir l’effort ou la mise en difficulté. Son piano, datant du début du XXème siècle, sonne moins métallique et certainement un peu plus « baroque » que l’habituel instrument de concert, avec une très grande expressivité. Vinnitskaya déroule un véritable discours musical d’une grande fluidité naturelle, alliée à une grande force également. Réclamée par le public, la soliste donne deux bis, un court prélude puis une étude de Chopin (informations à confirmer par le Grand Théâtre de Provence), ce dernier morceau étant impressionnant dans l’ampleur de l’interprétation… on y entend tout un orchestre !
Après l’entracte, c’est au tour de Prokofiev avec sa Suite n°2 du ballet Roméo et Juliette, une partition bien connue des amateurs de danse. Les premières mesures très explosives font place ensuite à des passages plus solennels, et encore d’autres plus légers, plus sautillants qui évoquent la rencontre des amants. L’orchestre est de bonne tenue, même si l’on détecte plusieurs imprécisions concernant les pupitres de cuivres. En bis, les artistes élargissent le triptyque russe à un quatrième compositeur, Alexandre Borodine et ses Danses polovtsiennes extraites de l’opéra Le Prince Igor. (F.J. Photos Pressiana Petia, Marco Borggreve, Alex Vanhee )
Laisser un commentaire